Les bureaux et salles de conférence servent de lieux de visionnage à des fonctionnaires.
Mardi, 23 janvier 2024, trois hommes en costumes dévissent dans la salle de conférence du Secrétariat général du ministère des Finances. Leur conversation sur le football accompagne les actions des joueurs camerounais et gambiens retransmises sur grand écran. Ces collègues se trouvent là par la force des choses. Car, du fait de leurs fonctions, ces derniers n’ont pas pu se libérer très tôt pour visionner le match tant attendu dans leurs domiciles respectifs. «Quand il y a un match important comme celui des Lions indomptables, les bureaux se vident plus tôt que d’habitude. Mais ici chez nous, c’est différent, notre programme dépend de celui du ministre et donc tu ne peux pas bouger, il faut être disponible et prêt à fournir tout ce dont il peut avoir besoin pour le travail», expliquait un instant avant le match, Simon Nsemba, employé du même service.
Une vingtaine de minutes plus tard, le reporter du journal Intégration fait la rencontre de douze hommes au ministère de la Communication. Ces derniers sont réunis autour d’un écran de 32 pouces dans le hall de l’immeuble. L’anxiété se lit sur les visages des hommes arborant les casquettes de vigiles, employés, et visiteurs. Et les nombreuses tentatives de but des Scorpions renforcent l’électricité dans l’air. «Il n’y a plus de joueurs dans notre équipe. Mieux on sélectionne les gars dans les petits clubs ici, on les forme et on part aux compétitions avec eux», déclare un jeune homme identifié sous le prénom de Fridolin.
Des cris nous parviennent de temps à autres des bureaux alentours. Preuve que ces premiers supporters des Lions indomptables ne sont pas seuls. Eric T, la quarantaine environ, est resté au bureau, le temps d’achever du travail. À 18h38, le concerné corrige quelques documents tout en s’accordant quelques instants sur son téléphone pour le suivi de la rencontre. L’issue de la première partie du jeu semble confirmer ses pronostics de la journée. Car pour lui, les compétences des joueurs retenus pour la compétition pose problème: «Notre défense est nulle, les gars sont debout et personne ne s’engage véritablement pour contrer l’adversaire. Nos joueurs n’arrivent même pas à courir au stade. En fait, ils se comportent comme s’ils n’ont pas de pression».
Cameroun-Gambie sur toutes les lèvres
Eric T. n’en est pas à sa première conversation sur le sujet. Plus tôt dans la journée de mardi, des collègues et lui ont trouvé du temps pour se livrer à quelques analyses des précédentes sorties des Lions indomptables. «Si le Cameroun avait remporté son match contre la Guinée, l’on en serait pas là. Maintenant il faut à tout prix que l’on gagne. Mais de l’autre côté s’ils sont éliminés ça va permettre qu’on change définitivement le management du football au Cameroun. Parce que ce qu’on vit là c’est une catastrophe», a lancé l’un des interlocuteurs venu déposer un parapheur.
Ils ne sont pas seuls dans cette situation. Le bureau de Olivier S. au ministère de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire est pris d’assaut en début d’après-midi par deux collègues; qui, au détour des espoirs placés en la sélection camerounaise, moquent les performances de la Côte d’Ivoire la veille. Les réseaux sociaux sont fouillés pour la cause. Et chaque publication ingénieuse fait l’objet de commentaires appuyés. La séance y relative dure une trentaine de minutes, tant il y a à voir et tant il y a à dire. «Les Ivoiriens-ci se sont trop moqués de nous quand on a perdu contre la Guinée et eux ils se font battre 4-0. Il est donc vrai qu’il ne faut pas se moquer de celui qui se noie tant qu’on n’a pas encore soi-même traversé le cours d’eau», lance Olivier S.
Louise Nsana