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Cameroun-Union européenne : Bal de faux-semblants au Minrex

Pour des analystes, les discours de la « Première session ordinaire annuelle du dialogue politique structuré Cameroun-Union européenne (UE) » servent d’aiguillons à l’interprétation des intentions des deux parties.

Au sortir du dialogue politique structuré entre le Cameroun et l’UE.

«Première session ordinaire annuelle du dialogue politique structuré Cameroun-Union européenne». À lui seul, l’intitulé de la rencontre de ce 12 juin 2019 à Yaoundé entre les deux parties est tout un programme. Pour du lourd, c’est du lourd. Face à face, Camerounais et Européens doivent (encore) discuter des thématiques autour desquelles les positions des uns et des autres sont connues. À la fin de la journée, la déclaration conjointe que signent Adoum Gargoum (ministre délégué auprès du ministre des Relations extérieures chargé des relations avec le monde islamique) et Hans-Peter Schadek (ambassadeur, chef de délégation de l’Union européenne au Cameroun) joue la sobriété. Le texte, qui s’arrête sur 11 points inscrits à l’ordre du jour, baigne dans des évitements langagiers, charriant le sentiment que les mutineries finies, le cap est mis sur l’unité, d’abord et avant tout. Adoum Gargoum et Hans-Peter Schadek jurent, la main sur le cœur, que «les deux parties se sont félicitées pour la qualité et la franchise qui ont toujours jalonné leurs échanges».

Méfiance
Reste que des deux côtés de la table, le moindre battement de cils est interprété. Preuve qu’à l’écho qui a résonné dans les murs de la salle des actes du ministère camerounais des Relations extérieures (Minrex), ont répondu des murmures de méfiance entre les deux parties. Dans un camp comme dans l’autre, les porte-paroles masquent l’envie de ne rien changer sur leurs positions respectives, sans percuter l’iceberg. Ainsi, dans son propos liminaire, Adoum Gargoum est revenu sur les manifestations du 26 janvier 2019 dans les ambassades du Cameroun en France et en Allemagne. Il a également évoqué la résolution du Parlement européen portant sur la situation au Cameroun.

Dans sa prise de parole, Hans-Peter Schadek a mis en avant la satisfaction de l’UE pour la mise en place d’un dialogue inclusif en vue d’une paix durable au Cameroun. Au nom des Européens, l’Allemand s’est dit disposé à rencontrer son « partenaire » en novembre prochain, dans le cadre d’une autre session annuelle de leur dialogue.

«Dans le fond, diplomatiquement, le premier orateur dit au second : “nous avons pris en compte vos pressions”.

iplomatiquement aussi, le second lui répond : “nous sommes heureux que notre travail ait eu des résultats”», analyse Jean-Marc Bikoko, activiste de la société civile. Pour sa part, Belinga Zambo pense qu’«en diplomatie, si les discussions se sont déroulées avec franchise et doivent être poursuivies, cela indique que peu de choses concrètes ont eu lieu entre les partenaires et que ceux-ci, afin d’éviter de briser le lien et le contact, décident de continuer à se voir».Sous le scalpel du politologue émérite, « il y a à craindre que l’UE ne soit venue dire au gouvernement qu’à la prochaine occasion, nous évaluerons ce que vous ambitionnez faire pour désamorcer la crise ».

L’on se souvient qu’il y a quelques semaines, dans sa lecture de la situation sociopolitique au Cameroun, l’UE s’était appliquée à guillotiner les autorités locales sur la place publique. Devant la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française qui l’auditionnait, le 28 mai 2019, Jean-Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères, avait déclaré que, en plus des morsures de la meute constituée des Nations unies et son pays, l’UE tout entière faisait pression sur le Cameroun. Le même jour, Lejeune Mbella Mbella rappelait aux diplomates et assimilés accrédités à Yaoundé que le Cameroun est un État libre et souverain.

Jean-René Meva’a Amougou

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