Cameroun – France : La crise anglophone dérape en crise diplomatique
Le ministre Paul Tasong accuse la France de ne pas tenir ses promesses de contribution au Plan présidentiel de reconstruction et de développement du Nord-Ouest et Sud –Ouest (NOSO). Christophe Guilhou, ambassadeur de France au Cameroun, les 13 et 14 juillet 2022 respectivement à Douala et Yaoundé, apporte un démenti formel aux déclarations du membre du Gouvernement camerounais. Qui croire ? Où sont passés les 40 milliards de la discorde ?

«Tout ce qui se dit dans les medias nationaux est faux, la France ne s’est pas retirée du Plan de reconstruction des régions dites anglophones. Elle a accordé une somme de 40 milliards FCFA», a lâché l’ambassadeur de France au Cameroun, Christophe Guilhou, au cours des interviews accordées à la presse à l’occasion des festivités de la fête nationale de son pays. Parlant aux médias dans l’effervescence de la célébration du 14 juillet autant à Douala qu’à Yaoundé, le diplomate français en a profité pour souligner «l’exubérance actuelle des relations entre Paris et Yaoundé». «Aucun nuage n’existe», a indiqué Christophe Guilhou. Belle occasion pour lever toute équivoque sur la contribution de la France dans les zones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en proie à une crise socio-politique depuis 2016.
L’ambassadeur de France au Cameroun confirme les propos du ministre français des Affaires étrangères et de l’Europe de l’époque, Jean Yves Le Drian, lors de sa visite de travail à Yaoundé le 24 octobre 2019. Une aide qui était alors conditionnée par la pacification. «Avant de commencer la reconstruction, il va falloir que la région soit pacifiée. Il va falloir que vous aboutissiez à un accord de paix entre les bandes armées et le gouvernement», avait affirmé Christophe Guilhou au cours d’un entretien diffusé le 19 avril 2020 sur la CRTV. Une posture d’ailleurs contestée par le ministre Paul Tasong, le coordonnateur national du Plan présidentiel. Lequel s’appuie sur le cas de l’Ukraine. Pour le membre du gouvernement, les partenaires de l’Ukraine se sont réunis pour mobiliser des financements évalués à 750 milliards de dollars pour la reconstruction du pays «alors que la guerre est toujours en cours».
La sortie de l’ambassadeur vient en réponse à la sortie du ministre délégué au Minépat. En effet, au cours d’une sortie publique la semaine dernière à Yaoundé, le coordonnateur national du Plan présidentiel pour la construction du NOSO disait n’avoir rien reçu de la France, qui avait pourtant annoncé une enveloppe de 40 milliards de FCFA, au titre de sa contribution pour reconstruire la zone anglophone du Cameroun.
Quoi qu’il en soit, le jeu de pingpong entre les deux parties appelle à plus d’informations de part et d’autre. En effet, l’ambassade de France pourrait rendre public les virements bancaires effectués dans les caisses de l’Etat camerounais au titre de sa contribution dans la reconstruction du Noso. Le Gouvernement camerounais, quant à lui, est attendu dans un exercice de transparence dans la gouvernance des ressources de reconstruction Noso, en expliquant ce qui apparait comme des dysfonctionnements au sein Plan présidentiel pour la reconstruction du Noso.
Olivier Mbessité