Alamine Ousmane Mey et Ousmane Diagana ont revisité les piliers du partenariat entre les deux parties. Le 13 septembre dernier à Yaoundé, ils ont exploré des pistes pour donner plus d’épaisseur aux interventions de l’institution de Bretton Woods.
Le vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’ouest et centrale a entamé le 13 septembre dernier une visite de travail de trois jours au Cameroun. Et pour son premier voyage dans sa zone de compétence depuis sa nomination le 1er juillet 2020, Ousmane Diagana est venu à la rencontre des autorités camerounaises les mains pleines. Dans le cadre de l’audience avec le ministre de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), par ailleurs gouverneur de la Banque mondiale pour le Cameroun, il était en effet prévu que «quatre conventions de financement soient éventuellement signées».
Au Minepat, on indique d’ailleurs qu’il s’agit «de prêts concessionnels d’un montant global de 631,9 millions d’euros, soit environ 414,5 milliards FCFA. Car il s’agit de financements mobilisés à hauteur de 69% auprès du guichet IDA contre 30% seulement auprès du guichet BIRD; le reste étant des dons».
Sur cette question, le vice-président de la Banque mondiale a pour sa part laissé entendre le 13 septembre dernier, que «nous avons un partenariat fort avec le Cameroun reposant sur un certain nombre de programmes, 15 au total au moment nous parlons. Mais avant la fin de ma mission ici, le nombre de programmes sera porté à environ 19».
Nouveaux projets
C’est pourtant le 16 septembre dernier, soit un jour après la fin de la visite de travail du Mauritanien, que le président de la République du Cameroun a signé trois décrets. Par ces actes, Paul Biya habilite le Minepat «à signer avec l’Association internationale de développement (IDA)» des accords de prêts. Le premier d’un «montant de 112,400 millions d’euros, soit environ 73,734 milliards FCFA (est dédié, Ndlr) au financement du Projet d’Appui au développement de l’Enseignement secondaire et des compétences pour la croissance et l’emploi (PADESCE)». Pour le deuxième «d’un montant de 179, 7 millions d’euros, soit 117,8 milliards FCFA, (il est contracté en vue, Ndlr) du financement du Projet d’amélioration et de valorisation des investissements dans la vallée de la Benoué (Viva-Benoué).
Quant au dernier accord de prêt d’un montant de 68,5 millions d’euros, soit environ 44,9 milliards FCFA, le chef de l’État le destine au «financement du Projet régional sur l’autonomisation de la femme et le dividende démographique, volet Cameroun (SWEDD2», prescrit le décret.
Seul pour l’instant n’a pas encore fait l’objet d’un acte du président de la République, «le Projet d’interconnexion des Réseaux électriques du Cameroun et du Tchad (RISRIN)», apprend-on.
Quoi qu’il en soit, le portefeuille actif de la Banque mondiale au Cameroun est appelé à prendre du volume. Il était jusqu’à lors d’un montant de 1 813,65 millions de dollars, soit 997,5 milliards FCFA pour 15 projets.
À la Primature
La visite de travail en terre camerounaise a également conduit le vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’ouest et centrale dans les services du Premier ministre. À l’issue de sa rencontre avec Joseph Dion Nguté ce 13 septembre 2021, Ousmane Diagana a révélé que sa présence à Yaoundé avait aussi pour but d’aider le Cameroun à acquérir des doses de vaccins anti-Covid-19. «Nous avons déjà mobilisé 30 millions de dollars pour vacciner le Cameroun et nous sommes prêts à débloquer 30 millions de dollars supplémentaires», a déclaré le haut responsable international qui s’est en outre montré intéressé par le potentiel énergétique du Cameroun, ainsi que par l’économie numérique.
Agenda
L’agenda du Mauritanien marquait aussi des rencontres «avec les partenaires au développement, les représentants des organisations de la société civile, le personnel médical du Centre international de vaccination, et une visite à l’école publique d’Ékounou-Awaé». Sur ce dernier point, le vice-président de la Banque mondiale a justement procédé le 14 septembre dernier, à la remise de matériel scolaire dans cet établissement. C’était en présence du Minepat Alamine Ousmane Mey et du Minedub, Laurent Serge Étoundi Ngoa.
Ousmane Diagana a achevé sa visite de travail au Cameroun dans la capitale économique. À Douala, il a rendu le 15 septembre dernier une visite de courtoisie au gouverneur du Littoral, Samuel Dieudonné Ivaha Diboua; au maire de la ville de Douala, Roger Mbassa Ndine, et a eu des échanges avec le patronat camerounais au siège du Gicam.
Théodore Ayissi Ayissi
Réalisations, du concret
La Banque mondiale joue au moins un double rôle auprès du Cameroun. Il y a celui moins connu de conseiller du gouvernement en matière de politique et des réformes économiques. C’est ce rôle qui a notamment permis au Cameroun d’obtenir en 2017, 2019 et 2021 un montant global de 500 millions de dollars. Ces fonds rentrent alors dans le cadre du Programme économique et financier adossé à la Facilité élargie de crédit signé avec le FMI.
Mais, il y a aussi le rôle très connu de financement des projets, avec à la clé de nombreuses réalisations. Dans le secteur de l’énergie par exemple, le symbole incontestable de la coopération entre les deux parties est la construction du Barrage hydroélectrique de Lom-Pangar. Il a permis de booster l’offre énergétique. Cela grâce à une production supplémentaire de 894 gigawatt/heure en 2018.
Cela dit, la Banque mondiale a également mobilisé auprès de son guichet BIRD, des financements d’un montant de 300 millions de dollars. Cependant, il s’agissait cette fois d’assurer la garantie partielle de risque en faveur du projet hydroélectrique de Nachtigal, a-t-on appris au Minepat.
Dans le secteur du développement social, 54 000 ménages pauvres répartis dans les dix régions ont bénéficié de transferts monétaires d’un montant global de 19,620 milliards FCFA. C’était dans le cadre du Projet Filets sociaux. De même, 21 communes ont reçu de la Banque mondiale 130 millions de dollars. Il était question pour ces collectivités publiques des régions de l’Est, de l’Extrême-Nord, du Nord et de l’Adamaoua, d’assurer la prise en charge des réfugiés.
Le secteur de la santé a également bénéficié de l’appui de l’institution de Bretton Woods. L’intervention a alors pris la forme du financement basé sur la performance. Le bénéfice a été immédiat pour la santé maternelle et infantile sur l’ensemble du territoire.
Les secteurs de l’éducation et des transports ne sont pas en reste. Puisque pour ce dernier secteur par exemple, le Projet de facilitation des transports et du transit en zone Cemac est aussi à mettre à l’actif de la coopération.
TAA
Ils ont dit
Alamine Ousmane Mey, Minepat
«Grâce à la Banque mondiale, le Cameroun a pu obtenir un taux de croissance de 0,7%»
Notre session va certainement permettre, non seulement de renforcer le dialogue et la coopération entre la Banque mondiale et le Cameroun, d’examiner les aspects qui relèvent de ce portefeuille, d’envisager les opérations futures pour poursuivre le développement de notre pays et enfin, si l’occasion nous est donnée, de signer des conventions afin de renforcer cette coopération.
Je voudrais saluer l’action de la Banque mondiale parce que nous sommes toujours en période de pandémie de Covid-19. Et en 2020, l’institution à travers des financements rapides, à travers le projet Covax pour l’acquisition des vaccins et à travers l’utilisation des ressources IDA, a de manière anticipée appuyé notre pays dans le cadre de sa riposte. Ce qui nous a permis de faire face à la pandémie et de maîtriser la situation.
Parlant des conséquences à la fois économiques, financières et sociales de la pandémie, cette situation a eu des contraintes fortes sur les pays, et sur nos pays en particulier. Au plan budgétaire, les situations étaient assez difficiles et liées à la baisse des revenus et à une augmentation des dépenses prioritaires. Avec évidemment les soldes budgétaires qui se sont dégradés.
À l’extérieur, les soldes courants se sont aussi dégradés, et on a également observé une augmentation de l’endettement. Dans la sous-région, nous avons connu globalement un taux d’endettement de 55%, et au niveau du Cameroun, nous avons atteint 44% de taux d’endettement. Mais dans ces conditions-là, le Cameroun a réussi à préserver son évolution avec un taux de croissance de 0,7% alors que nous nous attendions à une récession de près de 3%. Tout ceci évidemment grâce aux différents soutiens qui nous venaient de la Banque mondiale, du FMI et des autres partenaires au développement.
Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale.
«Le pourcentage du Cameroun dans notre portefeuille se situe entre 6 et 7%»
J’ai eu le privilège d’être nommé le 1er juillet 2020 comme vice-président de la Banque mondiale de l’Afrique de l’ouest et de l’Afrique centrale. Et il me paraissait urgent de venir sur le terrain. Mais malheureusement, ma nomination a pris date au moment de la Covid-19 et on ne pouvait pas voyager.
Mais le choix du Cameroun comme le premier pays que je visite en Afrique centrale me paraissait tout naturel pour deux raisons. La première c’est que le Cameroun a certainement, au niveau du continent, et en tout cas en Afrique subsaharienne et en particulier en Afrique occidentale et centrale, la capitale humain, physique et naturel le plus fort. Ma visite vise donc sur ce point à écouter le gouvernement camerounais pour faire en sorte que ce capital-là puisse véritablement se développer et se transformer en croissance économique forte pour les populations.
La deuxième raison est que notre portefeuille au Cameroun a augmenté de manière significative ces dernières années. Sur les 280 projets nationaux que nous avons pour l’Afrique de l’ouest et l’Afrique centrale, le Cameroun en a 15 et cela se situe autour de 6 ou 7% de notre portefeuille. Et sur les 40 milliards de dollars que nous investissons actuellement dans cette zone, le Cameroun a 3 milliards de dollars. C’est extrêmement important.