Des coupes budgétaires sont opérées sur certaines enveloppes; des fonds supplémentaires sont alloués à d’autres.
Prosaïquement, on dira que pour l’exercice 2020, quelques ministres vont gérer un peu plus d’argent pendant que d’autres devront se serrer la ceinture. Mis bout à bout, les chiffres défendus devant les parlementaires par différents membres du gouvernement le démontrent clairement. Exemples: en 2020, Emmanuel Nganou Djoumessi, ministre des Travaux publics (Mintp) aura à sa disposition un portefeuille de 459,60 milliards FCFA, contre 361, 344 FCFA en 2019. À côté, Célestine Ketcha Courtès, sa collègue du ministère de l’Habitat et du Développement urbain (Minhdu) se taille 141,1 milliards FCFA, contre 143,156 milliards FCFA en 2019. Pour piloter les activités de son département, Jacques Fame Ndongo, ministre de l’Enseignement supérieur (Minesup), aura droit à un plus de 65 milliards FCFA, contre 58, 952 milliards FCFA à lui octroyés en 2019. Pour sa part, Paul Atanga Nji, ministre de l’Administration territoriale (Minat) va gérer 30, 547 milliards FCFA, bien mieux que les 27, 327 milliards FCFA de 2019.
Dans le club des ministères à «enveloppes tronçonnées», l’on retrouve (entre autres) celui de la Défense; juste quelques 244,407 milliards FCFA de budget en 2020. En 2019, ce ministère, à vocation strictement stratégique, avait eu droit à 247, 447 milliards FCFA. Au ministère de la Décentralisation et du Développement local (Minddevel), bien que modeste, la coupe est évidente: 44 milliards FCFA en 2020 contre 45 ,786 milliards FCFA en 2019. Au ministère des Relations extérieures (Minrex), Lejeune Mbella Mbella n’obtiendra que 34 milliards FCFA, assez loin des 37 681 milliards FCFA de 2019.
Financements trop accommodants
«D’une part, les données mettent en évidence la diversité des priorités et, d’autre part, elles fournissent des indications sur les choix de politique budgétaire faits par le gouvernement», situe Benjamin Etienne Dooh. L’analyste financier croit savoir que les enveloppes allouées aux départements ministériels sont conformes aux classifications économique et fonctionnelle des recettes et dépenses des pouvoirs publics. «Ceci suppose que dans la grille de répartition, on a identifié les enjeux et faiblesses des mécanismes de financement des institutions publiques. Le contexte économique actuel nécessitant, lui, des décisions expresses pour exister et persévérer, on est conduit à penser que le budget peut être régulé par modulation ou rationnement, mettant ainsi la dépense sous contrôle», appuie-t-il.
Entre les lignes, un ancien questeur à l’Assemblée nationale lit la volonté de lutter contre la faiblesse des outils de pilotage financier dans certains ministères où la mécanique semble emballée sous l’effet de recettes faciles. «Là-bas, explique notre interlocuteur, la dépense a souvent été encouragée par la conviction euphorisante que la ressource suit toujours, malgré des instruments imparfaits et médiocrement opérationnels». Ainsi, sur le budget 2020 arrêté à 4 951,7 milliards FCFA, la griffe du parlement se perçoit dans l’ambition de remplacer la notion d’équilibre budgétaire par celle, plus large, d’équilibre des finances publiques. Le tout se rapporte évidemment à la trajectoire économique de l’exécutif, définie par Joseph Dion Ngute le 30 novembre 2019 à l’Assemblée nationale. À cette occasion, le Premier ministre avait confié à nos confrères de la CRTV que «l’objectif à long terme de ce budget, c’est de construire une nouvelle prospérité camerounaise, qui doit bénéficier à tous les Camerounais».