Médecine traditionnelle : Le plaidoyer de l’Union africaine 

 L’organisation continentale exhorte les pays africains à encadrer ce secteur de santé publique dans des législations nationales.

 

Les questions de santé publique ont été au centre de la 32e session de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine (UA), tenue le 10 février à Addis Abeba en Éthiopie. A l’occasion, l’UA a reconnu la contribution de la médecine traditionnelle à la santé publique sur le continent. Elle estime même que la médecine traditionnelle peut contribuer à la réalisation des objectifs du développement durable inhérent à la préservation de la santé humaine et environnementale en Afrique et dans le monde. Selon ses chiffres, 85% des populations africaines ont recours aux services de la médecine traditionnelle. Toutes générations, classes et échelles sociales confondues, les Africains se soignent énormément au traditionnel.

Et pourtant, la décennie 2001-2010, déclarée «décennie de la médecine traditionnelle africaine», n’a pas mis sur pied un cadre approprié pour l’évolution de ce secteur d’activité. Si certains pays d’Afrique australe, occidentale semblent avancés, l’immense majorité des pays africains maintiennent la médecine traditionnelle dans l’informel. Moins de 25 pays africains ont mis en place des programmes nationaux de médecine traditionnelle. Moins de 20 ont créé des services nationaux de la médecine traditionnelle. Moins de 10 États membres de l’UA ont des cadres nationaux d’expertise pour le développement de la médecine traditionnelle.

Défis
Afin de sortir ce secteur de santé publique de son état artisanal pour en faire une filière de réalisation des chaines de valeurs sanitaires, l’organisation continentale invite ses États membres à ériger des mécanismes juridiques d’encadrement de ce secteur. Ceux-ci pourraient procéder soit par l’incorporation de la médecine traditionnelle dans les législations et stratégies nationales de santé publique, soit la promulgation des instruments spécifiques. L’objectif est de garantir l’organisation de la formation des médecins spécialisés, la protection des plantes médicinales, la promotion de la recherche en médecine traditionnelle, le lien avec la sécurité alimentaire entre autres.

Trois principaux défis devront cependant être relevés pour viabiliser le secteur de la médecine traditionnelle. La modernisation en vue du respect des normes modernes de sécurité et d’efficacité. Il faudra en plus concilier le développement de la médecine traditionnelle et la préservation de l’environnement. Les défenseurs de l’environnement craignent que la croissance du marché de la médecine traditionnelle soit un danger pour la biodiversité, à cause de la surexploitation des plantes médicinales ou d’un usage accru d’une certaine catégorie d’animaux menacés de disparition comme les tigres, les rhinocéros et les éléphants. Le troisième défi, et non des moindres, c’est la coexistence et la démarcation entre la médecine traditionnelle et la médecine moderne. Il y a un impératif à sensibiliser sur les différences fondamentales sur la manière dont chacune est pratiquée, évaluée et gérée.

Zacharie Roger Mbarga

Financement de la santé

Les mesures préconisées par l’UA

Résolue à accroitre la mobilisation des ressources en matière de santé, l’organisation panafricaine appelle à des efforts croisés d’investissements entre le secteur public et le secteur privé.

 

Les trois objectifs que souhaite atteindre l’UA sont l’élargissement de l’accès à des services de santé de qualité, la réalisation de la couverture sanitaire universelle et la garantie de la sécurité sanitaire du continent. Ainsi, l’organisation continentale appelle les États à s’engager à consacrer 15 % de leur budget pour le financement de la santé. L’UA autorise cependant «chaque État à y aller à sa manière».

Il est tout de même préconisé aux États membres de renforcer leur capacité de gestion des finances publiques afin d’améliorer la perception des impôts et/ou d’accroitre la part des recettes fiscales collectées en pourcentage du PIB. Pour plus d’efficience, l’UA appelle les États membres à réorienter les dépenses de santé et les systèmes de santé, afin de cibler les maladies et les affections provoquant plus de mortalité ou empêchant le développement du capital humain. Cette priorisation pourrait dégager des fonds nécessaires.

L’UA invite par ailleurs les États à accorder plus de place au secteur privé dans la proposition des offres de santé. Aucun quota n’est déterminé, mais cela devrait se faire au prorata des «insuffisances du secteur public». Toutefois, l’UA engage l’État à veiller «à l’accessibilité des soins privés».

Sur la fabrication de produits pharmaceutiques pour l’Afrique, l’UA demande aux États d’harmoniser les réglementations afin d’accroitre l’accès aux médicaments. L’industrie pharmaceutique impliquant des coûts élevés, les États sont encouragés à développer l’intégration sociale, en développant des partenariats avec des pays africains avancés dans le domaine.

Zacharie Roger Mbarga

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