Investissements dans le foncier: les financiers perdent pied

Suite à la décision du Mindcaf de suspendre les immatriculations, ces bailleurs de fonds des travaux d’aménagement sont aux abois. Quelques-uns ont été rencontrés à Yaoundé.

La pilule est très difficile à avaler pour les hommes d’affaires du foncier. Colères, insultes, critiques et malédictions sont proférées par ces derniers à l’endroit du ministre des Domaines, du Cadastres et des Affaires foncières (Mindcaf). Ces ressentis sont visibles sur leurs visages. C’est que leur fonds de commerce reposait sur l’établissement des titres fonciers, la réalisation des lotissements, ainsi que sur les morcellements et autres opérations de mutations. Or la situation actuelle les rend vulnérable. «C’est un coup dur que ce monsieur porte à mes affaires. Je fais comment avec les dettes que j’ai contractées dans les tontines», déclare un gros opérateur de ce secteur. Les plus durement frappés sont les opérateurs qui officient dans les départements de l’Océan, la Mefou-et-Afamba, la Mefou-et-Akono. «J’ai investi toutes mes économies pour sortir un titre de 7 ha à Mvog Evoundou dans l’arrondissement de Mfou», déclare par exemple Henri Kenfack, un financier abattu, rencontré à la Conservation de Mfou.

Le Mindcaf est dès lors voué aux gémonies par les financiers. Ceux-ci l’accusent de vouloir plonger le pays dans une guerre. «Elle risque d’éclater dans ce pays à cause du foncier. J’ai contracté des dettes de 75 millions FCFA qui sont en réalité des lots que j’ai déjà vendu à mes créanciers. Vous croyez que je vais laisser mon butin partir en fumé», fulmine l’un d’eux. Le titre foncier qu’il finance est en effet bloqué par l’arrêté du Mindcaf. Ils sont rejoints par Me Charles Tchoungang. L’ancien bâtonnier affirmait en 2021 lors de son passage sur STV dans l’émission 7hebdo que «le ministre prend des décisions iniques et susceptibles d’embraser le pays». D’autres le qualifie de tribaliste qui veut gâcher les affaires des ressortissants de certaines régions. «Je pense que le ministre est jaloux des gens de l’Ouest et il veut nous empêcher d’investir, surtout en pays Beti», le mot est lâché par un homme d’affaires visiblement dépité et visiblement de cette région. Il était sur le point de conclure un accord pour établir un titre foncier d’une superficie de 18 ha à Nkol et Afamba dans la Mefou-et-Afamba.

Joie
Contrairement aux lamentations des financiers, les populations autochtones sont contentes et saluent la décision du ministre qu’elles qualifient de «très importante et juste». Cette joie se manifeste à travers au moins 30 familles recensées qui ont des problèmes intra ou avec des partenaires. Et les informations recueillies auprès de celles-ci montrent que «les financiers maîtrisant plus le droit font signer des contrats dans lesquels ils passent le temps à nous duper, nous les paysans qui ne maîtrisons pas le droit», explique un avocat. Plus encore, «les titres fonciers ne contiennent pas les surfaces indiquées sur les papiers. «Parce qu’ils s’arrangent souvent avec les géomètres, créant les conflits à la longue», confirme un géomètre assermenté rencontré à la délégation départementale du Mindcaf pour le Mfoundi. Les populations appellent alors les pouvoirs publics à les accompagner parce qu’elles sont abandonnées entre les mains des experts (financiers, géomètres et surtout magistrats).

André Gromyko Balla

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