Francophonie et Commonwealth : «Baratineurs internationaux»

Voici une expression dont le charme polémique trouve sa formulation la plus achevée dans les grandes et petites manœuvres menées en Afrique par deux organisations internationales : l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et le Commonwealth.

Ces deux dernières semaines, sous une forme larvaire, ces mastodontes semblent se livrer à un pugilat. Ceux qui s’opposent à cette interprétation de cette actualité pourraient se raviser dès lors qu’on leur expose la situation avec les bons mots. Et les bons mots ici sont: flatteries, contre-forces idéologiques et recherche de leadership.

Dernièrement, l’OIF a décidé de reporter d’un an son sommet prévu pour les 20 et 21 novembre dernier en Tunisie. Par la magie souveraine de ses mots, le Conseil permanent de la Francophonie (CPF) a annoncé que «les représentants des États et gouvernements membres ont débattu ouvertement et dans un souci de cohésion et de solidarité, sur l’organisation du sommet en Tunisie dans les délais initialement prévus. Ils sont arrivés à un consensus sur la nécessité de reporter d’un an le 18e Sommet de la Francophonie, afin de permettre à la Tunisie de pouvoir organiser cette instance importante dans les conditions les plus optimales». Dans la forme et sur le fond de la sortie du CPF, il s’agit bien de flatteries habillées de mots ronflants, leur donnant figure d’objectivité. Or, le vrai kit préparé pour l’explication, c’est que Tunis torpille la démocratie. Oui! Parce qu’il croit s’adresser à des cœurs glacés et à des cervelles brouillées, le CPF créé des fantômes contre lesquels nul raisonnement, nul fait visible ne prévaut.

Entre temps, ceux qui suivent cette actualité se sont demandé quelle pouvait être la liaison entre le report du Sommet de la Francophonie et le maintien (au Rwanda l’an prochain) de celui du Commonwealth. En toute hypothèse, ces experts pensent que le rapprochement des anciennes colonies françaises d’Afrique est bien réel. Ils disent aussi qu’à l’OIF, on sait que le flottement est croissant dans les rangs. On sait que la fascination anglo-saxonne traverse quelques États. C’est le Mozambique qui a été le premier État n’utilisant pas l’anglais à rejoindre le Commonwealth en 1995, suivi du Rwanda en 2009. Depuis, la liste ne cesse de s’allonger. Il y a le Gabon et le Togo qui ambitionnent d’adhérer au Club des gentlemen.

Schématiquement, tel que l’on peut l’observer, ce qui se joue aujourd’hui en Afrique n’est pas une simple parenthèse. C’est que, sur le continent, chacun de son côté, l’OIF et le Commonwealth s’épient. Pour espérer gagner le «duel», Londres se remotive chaque jour en se créant un concurrent qui tarde à se retirer. La rhétorique déployée consiste à purifier les États africains des démons de la Francophonie. À Paris, on joue le même jeu contre Londres.

Au vrai, d’un côté comme de l’autre, il s’agit d’un projet participant d’un activisme diplomatique qui doit contribuer à la visibilité et à la reconnaissance de Londres et de Paris en terre africaine, confirmant ainsi la problématique de l’indépendance inachevée des États africains. Inconsciemment ou non, ceux-ci prêtent malheureusement le flanc à ces baratineurs internationaux ; oubliant que, pour jouir d’une indépendance politique et économique, la voie de salut est le décloisonnement des frontières, la solidarité entre les peuples.

Jean-René Meva’a Amougou

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