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Fraude et évasion fiscales : 4 milliards FCFA recouvrés en sept ans

Les administrations douanière et fiscale mettent également en avant un certain nombre d’actions entreprises et destinées à limiter les risques de telles pratiques.

Face aux dégâts des Flux financiers illicites (FFI) sur notre économie, le gouvernement du Cameroun n’entend pas baisser les bras. Il peut déjà se satisfaire de ce que dans sa croisade contre la fraude et l’évasion fiscales par exemple, «4 milliards FCFA ont pu être recouvrés entre 2013 et 2019». C’est du moins ce qu’il ressort de la présentation par la direction générale des Impôts (DGI) des mesures prises en vue d’améliorer la transparence fiscale au Cameroun.

DGI
En effet, pour faire face à la fraude et l’évasion fiscales, le fisc a entrepris plusieurs actions. Sur le terrain du renforcement de sa capacité à accéder à l’information sur les FFI, trois types de mesures ont clairement été envisagées. Il s’agit au plan matériel de la «densification du réseau de partenaires conventionnels. Des instruments d’échange de renseignements sont déjà conclus sous la forme de conventions fiscales bilatérales avec la France, le Canada, la Tunisie, le Maroc, l’Allemagne, l’Afrique du Sud et les Émirats Arabes Unis», apprend-on.

Cette action vient du reste en appoint à la transposition dans le droit interne camerounais des mesures de transparence fiscales. La plus-value ici concerne «la consécration de l’obligation de communication de la documentation sur les prix de transfert, la dématérialisation des actions aux porteurs, et l’introduction d’une législation sur la sous-capitalisation…», fait savoir la DGI.

Au cours de la 1ère Conférence panafricaine-pays sur les Flux financiers illicites tenue à Yaoundé, l’administration fiscale a également tenu à rappeler qu’aux plans institutionnel et procédural, des avancées sont enregistrées. Puisque «l’Unité d’Échange international de renseignement et l’Unité BEPS sont déjà mises en place et sont spécialement dédiées à la lutte contre l’évasion fiscale». Par ailleurs, il apparaît que «la dématérialisation des procédures de déclaration et de paiement des impôts est un vecteur de renforcement de la disponibilité de l’information fiscale», fait-on valoir à la DGI.

Douanes
Du côté de la douane camerounaise, certaines pratiques sont également identifiées comme étant à combattre. Au rang de celles-ci, figurent les pratiques commerciales illicites, les attributions de marchés publics en marge de la réglementation, les abus de pouvoir, les détournements de fonds publics, la corruption et la contrebande. Pour y faire face, l’administration des douanes s’est déployée à travers «les contrôles de devises aéroportuaires, les échanges d’information avec l’Anif, les contrôles des exportations et la délivrance des AEE, le SYGEC (DI et DE), le Nexus++ et le CAMCIS».

Dans cette campagne, la coopération nationale, régionale et internationale joue également à plein. Elle permet notamment d’envisager des actions concertées avec le Groupe d’action contre le blanchissement d’argent en Afrique centrale (Gabac) et le Groupe d’action financière (Gafi). Ceci sans parler de la participation de cette administration à plusieurs opérations internationales de lutte contre les FFI.

Théodore Ayissi Ayissi

Places financières et non-double imposition

Les oubliées des Pandora Papers

Tax justice network Africa (TJNA) les classe pourtant parmi les causes les plus pernicieuses de fuites de capitaux en Afrique.

Depuis le 4 octobre dernier, l’actualité économique et financière dominante en Afrique est constituée des révélations du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ). L’affaire baptisée «Pandora Papers» fait état de fuites de capitaux à très large échelle via les sociétés écrans, l’évasion ou encore la fraude fiscale. Ces mécanismes sont ainsi présentés comme les principaux supports du phénomène. Ils constituent par ailleurs autant de pratiques réputées avoir trouvé un terreau favorable en Afrique. Pour preuve, plusieurs dirigeants africains et de la sous-région sont éclaboussés par ce scandale. Tv5 Monde parle notamment du président gabonais Ali Bongo Ondimba, du président congolais Denis Sassou Nguesso et de Zakaria Idriss deby Itno, le fils du défunt maréchal du Tchad.

Autres versants
Pour Tax justice network Africa (TJNA) cependant, ces révélations de l’ICIJ ne portent que sur la partie visible de l’iceberg. Car, «en plus des personnages publics indexés dans les Pandora Papers et qui siphonnent les caisses de l’État pour les cacher dans des paradis fiscaux», l’organisation pense savoir que le phénomène dispose d’autres ressorts. À l’appui de son argumentaire, elle évoque comme autant de mécanismes sous-estimés de fuites de capitaux, «les places financières telles que celles de Nairobi ou de Kigali (récemment créée)».

Et pour cause, «celles-ci exposent l’Afrique aux FFI à cause des taux d’impôts extrêmement bas voire inexistants qu’elles offrent pour attirer les investisseurs)», précise l’organisation.
Pour les mêmes raisons et compte tenu du manque à gagner évalué par le Cnuced à «88,6 milliards de dollars par an hors du continent», TJNA incrimine également «les accords de non-double imposition signés avec les paradis fiscaux comme l’Île Maurice, Seychelles (TJNA a traduit le gouvernement Kenyan en justice pour 10 de ces accords signés avec 10 paradis fiscaux)».

En outre, Tax justice network Africa s’appuie aussi sur les estimations de la BAD. Celles-ci font état de ce que les gouvernements africains ont besoin d’un financement brut supplémentaire d’environ 154 milliards de dollars en 2020/21 pour faire face à la crise du Covid-19. Toutes choses qui imposent alors de dénoncer «l’Accord du G7/OECDE sur le taux minimum de 15% d’impôts sur les multinationales qui risque de coûter plus cher à l’Afrique où l’impôt sur les sociétés est habituellement au moins de 30%».

Le Réseau pour la justice fiscale en Afrique espère ainsi parvenir à la réduction de ces fuites et augmenter par le fait-même, les capitaux disponibles pour la relance économique de l’Afrique.

TAA

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