Délits et crimes : La mode du bric-à-brac diplomatique

Des personnes ayant des soucis avec la justice au Cameroun attirent comme un aimant les instances diplomatiques.

Rebecca Enonchong quelques instants après sa libération.

Au Cameroun, elle est et sera toujours Rebecca Enonchong. Pour avoir été gardée à vue (officiellement) pour «outrage à magistrat et de troubles dans les services du procureur», le 10 août 2021 à Douala, la fille du Dr Henry Ndifor Abi Enonchong (avocat au barreau du Cameroun décédé en juin 2008 à Douala) a permis plusieurs milieux diplomatiques d’enlacer leurs voix pour sa libération. Celle-ci, a-t-on appris de sources officielles, est intervenue le 13 août dernier. Pendant son séjour à la légion de gendarmerie du Littoral, une impressionnante mobilisation autour de la cause de la directrice générale d’AppsTech a pris corps dans des milieux diplomatiques.

Dans un tweet posté en fin de matinée du 12 août 2021, Christophe Guilhou a joint sa voix à celles des partisans de «#FreeRebecca». En se limitant uniquement au hashtag, l’ambassadeur de France au Cameroun a bien marqué sa présence dans le concert des appels à la libération de Rebecca Enonchong. Dans la même veine, une communication du Haut-commissariat du Canada au Cameroun rapporte la préoccupation générée «par le signal envoyé aux investisseurs et partenaires étrangers». «Le gouvernement camerounais n’a-t-il pas honte? Même Poutine fait preuve de plus de finesse en emprisonnant des gens pour leur politique. L’heure est aux grands changements à Yaoundé», lit-on sur le compte Twitter de Tibor Nagy (ex-sous-secrétaire d’État américain aux affaires africaines) ce 12 août 2021.

En matière de crimes et délits souvent commis par des Camerounais binationaux, les différentes facettes de l’activité diplomatique observée se résument en deux verbes: «négocier et faire pression». Souvent utilisés par les diplomates eux-mêmes lorsqu’ils parlent de leur travail, ces verbes ont par exemple permis la libération de Maître Lydienne Yen-Eyoum en juillet 2016. L’avocate (accusée de détournement de deniers publics) avait alors bénéficié des soutiens d’un groupe de travail des Nations unies en charge des questions de droits de l’homme et du Quai d’Orsay. Autre exemple : Michel Thierry Atangana, ingénieur financier français d’origine camerounaise(lui-aussi accusé de détournement de deniers publics). «Abandonné des diplomates français qui le laissent croupir dans un cachot de 7 m2 au sous-sol du secrétariat d’État à la défense jusqu’à la nomination en 2009 d’un nouvel ambassadeur, Bruno Gain, Michel Thierry Atangana bénéficie finalement des pressions de François Hollande, intervenues bien après celles des États-Unis, des Nations unies et d’Amnesty International», écrit le Monde du 27 juillet 2021.

Jean-René Meva’a Amougou

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