Banque Africaine de développement : Le Président, acquitté!

Une enquête indépendante dirigée par l’ancienne présidente irlandaise Mary Robinson vient de disculper Akinwumi Adesina des lourds soupçons de népotisme et de mal gouvernance portés en son encontre par des lanceurs d’alerte soutenus par les Etats-Unis d’Amérique.

Le semestre qui a secoué la Banque africaine de développement (Bad) va-t-il enfin se refermer? Le Comité indépendant dirigé par Mary Robinson, qui devait une seconde fois, après le comité d’éthique de la Bad, plancher sur les allégations de mal gouvernance au sein de l’institution, a rendu son verdict. Il acquitte définitivement Akinwumi Adesina, le président de la Banque panafricaine de financement du développement.

Le comité d’examen indépendant se dit «convaincu que le Comité d’éthique [de la Bad] a examiné les plaintes qu’il a reçues le 19 janvier 2020 de manière complète et responsable et a suivi correctement les procédures… Le panel partage les conclusions du Comité concernant toutes les allégations contre le président et estime qu’elles ont été dûment examinées et rejetées par le Comité», indique son rapport. Pour ce qui est des éléments du mémoire de défense du président de la Bad, le rapport Robinson les juge «convaincants et suffisants» pour établir l’innocence de Akinwumi Adesina.

Voix royale vers un second mandat?
Cette décision a suscité des réactions sur le continent. Citons notamment Moussa Faki Mahamat, président de la commission de l’Union africaine; Muhammadu Buhari, le chef d’Etat nigérian, Ellen Johnson Sirleaf, ancienne présidente du Libéria… Tous ont tenu à traduire leur fierté et leur assurance quant à l’issue des enquêtes. Pour l’ancienne présidente du Libéria, c’est un dénouement évident. Moussa Faki Mahamat souligne la confirmation du leadership et de l’intégrité du président du la Bad et réaffirme le soutien l’Union africaine au «candidat approuvé» par le continent à la prochaine élection. Muhammadu Buhari, quant à lui, évoque un rapport qui «devrait enfin tirer un rideau sur les allégations qui ont créé des distractions pour l’institution ces derniers mois». Il «exhorte le Dr Adesina à rester inébranlable, dévoué et résolu dans la poursuite de ses nobles objectifs pour la Banque, en particulier avec le second mandat désormais attendu».

Échec et mat
Accusé de favoritisme, népotisme et viol de procédure, le président de la Bad avait été blanchi par le comité d’éthique de la Bad en mars dernier. Ses accusateurs (un groupe d’employés soutenus par l’administration américaine) avaient complètement remis en cause et rejeté les conclusions du rapport du comité dirigé par Takuji Yano, l’administrateur du Japon au sein de l’institution. Les Etats – unis ont notamment estimé que la décision prise par le Comité d’éthique du conseil et le Bureau du conseil des gouverneurs était «trop favorable» à monsieur Adesina.

A la constitution d’un comité indépendant composé de Mary Robinson, de l’ex-juge gambien Hassan Jallow, du Sud-Africain Leonard Frank McCarthy, ancien vice-président pour l’intégrité à la Banque mondiale et assisté de Nial Fennelly, ancien juge à la Cour européenne de justice, Steven Mnuchin, le secrétaire d’État américain au Trésor s’était félicité «de la décision des gouverneurs de procéder à un examen indépendant des travaux du comité d’éthique et de la nomination d’un groupe de haut niveau dirigé par l’ancienne présidente irlandaise Mary Robinson».

Bobo Ousmanou

Réforme de l’UA

La Commission new-look recrute!

Le processus de désignation des membres de la commission de l’UA est lancé avec la publication d’un appel à candidatures. Fait majeur, la commission passe de 10 à 8 membres.

 

L’Union Africaine renouvellera son organe exécutif en 2021. L’élection des commissaires devrait avoir lieu lors de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de janvier 2021. Le mandat des 10 commissaires de l’UA arrive à terme à cette date. Le processus de recrutement a été lancé le 7 juillet 2020. L’appel à manifestation de candidatures est disponible sur le site internet de l’UA dédié aux recrutements. Plus que 32 jours pour la clôture qui est prévu le 4 septembre à 23h59 (heure d’Addis-Abeba). Les candidatures devront ainsi parvenir dans cet intervalle. Pour les candidatures recommandées par les régions (communautés économiques régionales), elles devront parvenir au bureau du conseiller légal de l’UA dans une enveloppe fermée à 17H.

Ambitions
Dans les couloirs de la commission, le second semestre rime avec aurevoir et lobbying. Certains commissaires ont déjà notifié qu’ils passaient leur dernier semestre au sein de l’organisation continentale. On peut citer l’algérien Smaïl Chergui, commissaire paix et sécurité. Il vient de boucler son second mandat après avoir été réélu en janvier 2017. D’autres poursuivront peut-être l’aventure. Certains ont engagé des pourparlers avec leur gouvernement et l’establishment politique de leur région pour rempiler. C’est le cas du commissaire au commerce et à l’industrie Albert Muchanga. Il souhaite être reconduit pour parachever son œuvre d’établissement du marché unique africain: la Zone de libre-échange continental africaine (Zlecaf).

Le président de la commission, Moussa Faki Mahamat, ne serait pas non plus contre un second round qui lui permettrait d’inscrire son nom au panthéon. Plusieurs projets intégrateurs engagés ou muris au cours de sa présidence sont dans le circuit. Outre la Zlecaf, le marché unique du transport aérien en Afrique (Mutaa), le passeport africain, la libre circulation des personnes, la réforme de l’UA sont autant des projets qu’il souhaiterait associer à son palmarès. Si tout se passe bien, il serait le premier chef de l’exécutif continental à faire deux mandats depuis l’entrée en activité de l’Union africaine en 2002.

Rationalisation
La réforme de l’UA s’appliquera aussi avec la nouvelle cuvée des membres de la commission. On passera ainsi de 8 portefeuilles à 6. Le département du commerce et de l’industrie et celui des affaires économiques ont été fusionnés. Le département de la paix et de la sécurité et celui des affaires politiques ne feront plus qu’un seul.

La structure de la commission de l’UA 2021-2025 est donc la suivante: un président; un vice-président; un commissaire aux affaires politiques, paix et sécurité; un commissaire aux infrastructures et à l’énergie; un commissaire au développement économique, commerce et industrie; un commissaire à l’éducation, science, technologie et innovation; un commissaire à l’agriculture, au développement rural, à l’économie bleue et au développement durable; un commissaire à la santé, aux affaires humanitaires et au développement social.

Bobo Ousmanou

Zlecaf

La bonne affaire pour la Banque mondiale

Dans un rapport rendu public le 27 juillet dernier et intitulé «Zone de libre-échange continentale africaine : effets économiques et redistributifs», l’institution de Bretton Woods encourage les pays membres de l’Union africaine (UA) à finaliser le processus pour l’entrée en opérationnalisation sur le terrain du marché unique africain. La zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) est le bon catalyseur des mutations dont l’Afrique a besoin. Pour Albert Zeufack, économiste en chef de la Banque mondiale pour l’Afrique, la Zlecaf «a la capacité d’accroître les possibilités d’emploi et les revenus, ce qui contribue à élargir les perspectives de tous les Africains. Elle devrait permettre la sortie de la pauvreté modérée d’environ 68 millions de personnes et de rendre les pays africains plus compétitifs».

De manière détaillée, l’économiste en chef de la Banque mondiale indique qu’une fois mis en œuvre, cet accord commercial pourrait accroître le revenu régional de 7%, soit 450 milliards de dollars (250.712 milliards francs CFA). Ce qui représente 15% du produit intérieur du continent. Les contributions se feront de la manière suivante: la libéralisation des tarifs douaniers, de même que la réduction des barrières non tarifaires comme les quotas et les règles d’origine, permettraient d’augmenter les revenus de 2,4%, soit environ 153 milliards de dollars.

Les 292 milliards de dollars restants proviendraient de mesures de facilitation du commerce qui limitent les formalités administratives, abaissent les coûts de mise en conformité pour les sociétés commerciales et facilitent l’intégration des entreprises africaines dans les chaînes logistiques mondiales.

L’impact de la Zlecaf sur les revenus des citoyennes et citoyens du continent sera également positif: elle entraînerait également des hausses de salaire plus importantes pour les femmes que pour les hommes d’ici à 2035, avec des augmentations respectives de 10,5% et de 9,9%. Elle permettrait également d’augmenter de 10,3% le salaire des travailleurs non qualifiés et de 9,8% ceux des travailleurs qualifiés.

Bobo Ousmanou

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