Yaoundé II : Les dattes maliennes observent leur ramadan

Porté par quelques ressortissants d’Afrique de l’Ouest résidant dans le 2e arrondissement de la capitale camerounaise, le marché du « fruit béni par le Prophète» fait figure de bon filon économique pendant la période de jeûne.

Les époques changent, mais le jeûne du ramadan entre toujours en résonnance avec les dattes. Sur ce plan, il n’est nul besoin de se laisser conduire par la main pour comprendre pourquoi des cargaisons de dattes régentent la façade nord du marché Mokolo. Ici, « le ramadan, c’est une bonne date pour les dattes ». Dans la phrase que débite le Malien Batou Diallo, les puristes de la langue française ne pourraient s’attarder que sur l’homophonie. Reste qu’en filigrane, le versant business du jeûne se décline. Tenu par une trentaine de ressortissants d’Afrique de l’Ouest, il se décline surtout à la datte. « Rien qu’au début, nous avons déjà vendu 6 tonnes environ », confesse Fethi Hakkar. Reconnu comme le chef de ce segment du marché bien nommé « Ramadan », le Sénégalais reconnait que, contrairement aux deux dernières années, les horizons de l’affaire sont diversifiés en 2019.

Bon pour comprendre que cette année, le marché est au plus haut. Il est même lancé en roue libre depuis quelques jours. « On peut vendre la nuit quand les gens cassent le jeûne, personne ne nous gêne », relate Si Ndiaye, chef en second de « Ramadan ». Selon lui, ce n’est pas seulement l’humeur pécuniaire qui gouverne ici. Il y a, fait-il savoir, des musulmans camerounais qui travaillent jusqu’à tard dans la nuit. Ceux-là, ce sont « les grands clients ».

Devant les étals, en cette soirée du 6 mai 2019, le nombre et le standing de véhicules stationnés suffisent pour avoir une idée sur la masse et la diversité des clients. Le lieu accueille les clients naturels et les clients « dits du Ramadan ». À en croire Batou Diallo, cette clientèle-là est un puissant levier de mobilisation nocturne des vendeurs. « Si nous sommes ici jusqu’à ce moment, c’est que nous pouvons vendre aux revendeurs des petites villes qui viennent aussi s’approvisionner ici », déclare Fall Dieye. Pour cet autre Sénégalais, le tout est à lire au double prisme des variétés offertes et à la politique des prix mise sur pied par les Africains de l’Ouest. Prix mini, maxi et moyen sont actualisés tous les soirs « au nom de la solidarité musulmane », selon Fethi Hakkar.

Ainsi, pour les dattes fraîches et sèches, en provenance du Mali et d’Algérie, les prix varient entre 1100 et 1200 francs CFA le kilogramme. Quant aux dattes alaouites, réputées tendres et sucrées et venant du Maroc, elles coûtent2000 francs CFA. Il y a également une autre variété de dattes, vendue à 1500 francs CFA le kilogramme, dénommée dayri.

« Nous sommes obligés d’importer, car nous connaissons leurs goûts », clame fièrement Amadou Karan, un Burkinabé. Bien que coûteuse, cette politique est payante pour renouveler leurs acheteurs en cette période de grande piété. Pour cela, des packs d’un kilogramme, des sachets de 500 grammes, de petits sachets de 250 grammes sont aussi commercialisés. Il y en a même celles qui sont mises en sachets et vendues au prix de 25 FCFA par les vendeurs ambulants qui se faufilent.

Jean-René Meva’a Amougou

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