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«La résilience tant vantée de notre économie a été mise à rude épreuve»

A l’occasion de la rentrée du Groupement inter patronal du Cameroun (Gicam), son président a fait une sortie le 12 janvier 2018 articulée sur trois points : la situation économique du pays, le bilan de ses premiers mois à la tête du Gicam et sa feuille de route pour 2018. Sur chacun de ces aspects, nous proposons l’intégralité de sa communication.

A l’occasion de la rentrée du Groupement inter patronal du Cameroun (Gicam), son président a fait une sortie le 12 janvier 2018 articulée sur trois points : la situation économique du pays, le bilan de ses premiers mois à la tête du Gicam et sa feuille de route pour 2018. Sur chacun de ces aspects, nous proposons l’intégralité de sa communication.
Célestin Tawamba, président du Gicam. © Koaci.
  • Lecture de la situation économique du Cameroun

Comme il est désormais acté par tous, l’année 2017 aura été une année de contre-performance pour notre économie. Notre croissance a été en berne, passant de près de 6% en 2015 à 4,6% en 2016 pour se situer finalement à moins de 4% en 2017. A l’évidence, la résilience tant vantée de notre économie a été mise à rude épreuve par la crise sécuritaire et la chute drastique des cours du pétrole, notre toujours principal produit d’exportation.

On peut se féliciter de ce que notre pays ait mieux résisté que nos voisins de l’Afrique Centrale, mais force reste de constater que notre situation aurait été meilleure si les réformes structurelles tant souhaitées avaient été implémentées dans les temps et les formes requises.

Hélas, la situation difficile des finances publiques et des comptes extérieurs nous a contraints à nous engager dans un nouveau programme de réformes économiques et financières avec le FMI. Nous espérons tous qu’au bout de celui-ci, les résultats escomptés en termes de rétablissement de viabilité budgétaire et extérieure du pays, de promotion de la croissance et de création d’emplois seront atteints. Pour cela, il nous semble impératif d’envisager l’ensemble des réformes sous un prisme partenarial afin de préserver la capacité des entreprises à jouer leur rôle dans le processus d’émergence. Il apparaît en effet, à la lecture des initiatives engagées, que certaines peuvent s’avérer contre-productives. Nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir dans la suite.

Au final et au terme de cet exercice 2017, le quotidien des entreprises ne s’est pas amélioré, loin de là. Il s’est même détérioré pour un grand nombre d’entre elles. En plus du resserrement de la demande ayant induit des carnets de commande de plus en plus maigres, les entreprises ont dû composer avec des délais de paiements qui ne cessent de s’allonger, l’accumulation des retards de paiement, la multiplication des tracasseries administratives, dans un environnement global toujours très contraignant.

Situation des entreprises

Dans cet environnement morose, les éclairs ont été si rares qu’il convient de saluer les quelques-unes qui sont apparues. Nous voulons évoquer ici le bénéfice des avantages de la loi d’avril 2013 sur les incitations à l’investissements privé, lequel se traduit par quelques projets industriels visibles ; l’opérationnalisation de la plateforme Centrale des Incidents de Paiements (CIP) – Fichier Bancaire National des Entreprises (FIBANE) qui a permis à notre pays de gagner quelques places sur le classement Doing business ; le début de la mise en service de la plateforme du port en eau profonde de Kribi.

Nous ne saurons passer sous silence dans cette catégorie, la priorité accordée par le Président de la République aux difficultés de trésorerie des entreprises, et particulièrement des Petites et Moyennes Entreprises lors de son message à la Nation du 31 décembre 2017. Dans un communiqué presse qui ne vous a sans doute pas échappé, le Conseil exécutif du Gicam s’est félicité, et à juste titre, de la prise en compte par le Chef de l’Etat des doléances du Groupement en faveur de la dette des Petites et Moyennes Entreprises et de leur accès au crédit.

Nous avons affirmé notre disponibilité à contribuer et à soutenir les actions qui seront menées, nous le souhaitons, dès les prochaines semaines, une gestion transparente de cette prescription présidentielle. Au demeurant, nous espérons l’extension de l’effort gouvernemental aux crédits de TVA et autres préoccupations des PME dont leur besoin de protection.

  • Bilan des six premiers mois de l’équipe Gicam en Action

Comme vous le savez, l’équipe Gicam a été portée à la tête du Groupement le 29 juin dernier sur la base d’un Programme dont la philosophie d’action est sous-tendue par trois orientations fondamentales : le Rassemblement, la Réconciliation et la Refondation.

Suivant ce triptyque, nos six premiers mois ont été denses en activités. C’est ainsi qu’au titre des rencontres avec le Gouvernement, l’équipe du Conseil Exécutif a été reçue en audience par le Premier Ministre, et plusieurs membres du Gouvernement dont les Ministres en charge des Finances, de l’Economie, du Travail, des PME, de l’Industrie, du Commerce. Ce fut non seulement l’occasion de prendre contact, mais aussi et surtout de rappeler, dans les domaines respectifs de ces interlocuteurs, les problèmes qui se posent aux entreprises.

Notre engagement pour la refondation de notre mouvement patronal a été matérialisé, au cours de ce semestre, par un réaménagement de nos Commissions. La volonté ayant guidé cette démarche est de renforcer leur proactivité, leur efficacité et leur contribution à la formulation des prises de position du Groupement.

Nos actions les plus visibles ont sans doute été les quatre grands évènements que nous avons organisés et auxquels plusieurs d’entre vous ont sans doute pris part. Le premier a été le tout 1er Forum de la FME tenu le 24 octobre 2017. Cette rencontre a abordé trois thématiques spécifiques relatives aux PME : la protection, la fiscalité et le financement. Le Forum a débouché sur des propositions visant à structurer les efforts du secteur privé et des pouvoirs publics sur la question du développement de la PME.

Le second évènement a été le Forum des acteurs de l’Entreprenariat féminin. Celui bouclait un programme de 18 mois conduit avec le concours du Bureau international du Travail qui a notamment mobilisé à cet effet des ressources à hauteur de 350 000 dollars, environ 200 millions de Francs CFA. Le Forum a pris note de la formation de 200 femmes entrepreneures en Gestion des entreprises et de 100 femmes en Création et développement des entreprises, ainsi que la mise en place d’un réseau de formateurs interne au sein du Gicam.

Le troisième évènement concernait le Forum Gicam – Partenaires au développement ; une première qui visait à formaliser des contacts constants avec des institutions qui, soit développent des programmes de coopération technique avec le Cameroun, soit assistent techniquement et financièrement le Cameroun dans l’élaboration et la mise en œuvre de ses politiques économiques.

Le quatrième évènement et non des moindres est la nuit des pionniers de l’entreprise au Cameroun. Cette rencontre, qui couronnait les festivités marquant le 60ème anniversaire du Gicam, fut un instant de rassemblement et de convivialité pour partager l’idéal de l’entreprise et de l’entreprenariat. Nous avons, à cette occasion, souhaité rendre hommage à ceux qui, dès les premières heures du Cameroun indépendant, ont eu le courage d’oser et d’innover, dans la foi et la détermination pour construire l’entreprenariat camerounais. A titre symbolique, 60 d’entre eux ont été magnifié et nous tenons encore aujourd’hui à leur témoigner toute notre admiration.

Concomitamment à ces évènements très courus et qui ont été abondamment relayés dans la presse, plusieurs internes ont été engagés. Je voudrais évoquer ici l’Audit institutionnel et organisationnel du Gicam, la rédaction du Livre Blanc de l’Economie Camerounaise, le Groupe de travail sur la fiscalité. Nous aurons l’occasion de revenir sur certains de ces chantiers.

  • Principales orientations de l’action du Gicam pour 2018

Dans notre vision de Refondation, de Réconciliation de Rassemblement rappelée tantôt, l’action du Gicam en 2018, premier exercice complète de l’actuelle mandature, l’action restera guide par une ambition générale articulée en trois volets : un Gicam de services ; un Gicam d’influence ; un Gicam d’intelligence économique.

Dans le premier Volet « Gicam de services », notre volonté est de bâtir une organisation puissante au service de ses membres. Aussi, les actions déjà engagées seront poursuivies et conduites à terme. Il sera entre autres engagé une refondation complète des Services pour renforcer la fonction d’accompagnement des membres, particulièrement des PME/PMI. Notre Business Advisory Services sera notamment reconfiguré en un véritable Centre de Développement des Entreprises et sera le support d’un large éventail de Services à Valeur Ajoutée au bénéfice des PME.

Nous entendons tirer partie des Conventions déjà signés avec de partenaires prestigieux pour promouvoir un Label Gicam et faire bénéficier à ses membres des accès privilégiés et des facilités d’accompagnement dans les domaines tels que la formation, le développement de projets, le règlement des litiges, etc.

Afin de construire un patronat camerounais uni, plus fort, plus représentatif et plus puissant, nous entendons résolument consolider, autour du Gicam, l’interaction avec les fédérations professionnelles spécialisées et poursuivre le rapprochement entamé avec les autres organisations du secteur privé et les chambres consulaires.

Dans le volet «Gicam d’influence », nous entendons œuvre à la mise place d’un patronat véritable force de proposition pour les pouvoirs publics et les partenaires au développement. Compte tenu des écueils rencontrés actuellement dans le dialogue avec les pouvoirs publics, nous entendons, au cours ce premier trimestre 2018, procéder à une revue en profondeur des conditions du dialogue économique et social au Cameroun. Il s’agit pour nous de donner notre vision de ce que doivent être les structures formelles ou non du dialogue, le contenu des dialogues, les modes opératoires comme le partage de l’agenda, le suivi des recommandations et leur évaluation.

Plaidoyer

Afin de susciter le changement de paradigme de la politique économique au Cameroun pour équilibrer son centre de gravité entre secteur public et secteur privé, les initiatives visant à étoffer notre capacité de plaidoyer seront progressivement déployées. La première porte sur la publication du « livre blanc » de l’économie camerounaise. Elle sera complétée par la mise en place d’un tableau de bord de l’économie camerounaise qui nous permettra, sur la base des données qualitatives et quantitatives venant des membres, d’élargir et d’affiner nos analyses.

Dans la même veine, les résultats de la task force sur la fiscalité seront publiés au mois d’Avril 2018. Ils proposeront une alternative à notre modèle fiscal, à tout le moins ils fourniront des éléments qui feraient de notre système fiscal un instrument de développement. C’est sur la base de ces éléments que nous entendons améliorer les relations que nous entretenons avec les administrations fiscales et douanières. Nous avons déjà engagé des échanges pour que les plateformes déjà institutionnalisées soient définitivement activées pour qu’un véritable climat de convivialité puisse voir le jour entre, d’une part les administrations fiscales douanières et d’autre part, les contribuables.

Le troisième volet de notre action portera sur la construction d’un Gicam d’intelligence économique ; c’est-à-dire un Gicam de défense et de promotion de ses intérêts et de ses actions. En 2018, les chantiers prioritaires porteront sur la promotion des filières d’excellence et des champions nationaux, le renforcement de la protection de l’industrie locale et la lutte contre le commerce illicite et enfin, la promotion de la bonne gouvernance et de l’éthique en affaires.

Par ailleurs, nous entendons nous impliquer activement dans la révision engagée du Code du Travail. Dans ce chantier comme dans les autres, notre soucis premier restera le même : aménager les conditions idoines pour permettre aux entreprises de jouer pleinement leur rôle de créateurs de richesses et d’emplois.

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