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Visibilité indienne au Cameroun : Une ambassade pour participer au présent et au passé

À Yaoundé et à Douala, les relents de la joie hindoue soulignent une fin de calvaire dans le moyen et long termes.

Quelques visages indiens à Yaoundé

Son français, il l’a appris phonétiquement depuis son installation à Yaoundé, en provenance de son Thar natal (Ouest de l’Inde). Dans un phrasé à particules, Sadhil est tout en joie. Il passe d’un sujet à l’autre, d’une chanson à l’autre. Dans son travelling mental, l’Indien se félicite de l’implantation « vite vite ! » de l’ambassade de son pays dans la capitale camerounaise. Images dans l’image, la posture de cet homme, qui confesse être âgé de 58 ans (dont 12 passés au Cameroun), résume celle d’une demi-dizaine de ses compatriotes rencontrés ce 16 avril 2019 dans un restaurant à Yaoundé. Plus globalement, leurs mines mêlent dose de joie et de soulagement. «Tous les Indiens installés ici sont contents», résume Ravi Kumar.

Bénéfice
Si depuis Douala, le consul honoraire de l’Inde se félicite de l’ouverture officielle d’une ambassade indienne au Cameroun, nombreux sont ceux qui, parmi ses compatriotes, construisent déjà, à leur manière, le grand bénéfice à en tirer. «À nous, tout comme aux Camerounais, cela va faciliter l’obtention du e-visa. Avant, les compagnies aériennes opérant localement n’embarquaient pas des détenteurs de ce type de visa, sous prétexte qu’elles n’avaient pas encore reçu une notification officielle», situe Satyaki Swastik. Restaurateur bien connu au quartier Bastos (Yaoundé I), il mentionne qu’à travers cette décision, les autorités de son pays renoncent à la politique d’antan au profit d’une nouvelle approche. Selon lui, avec une représentation diplomatique formelle à Yaoundé, New Delhi poursuit simultanément deux stratégies: se rapprocher du Cameroun d’un côté et se positionner dans d’autres pays d’Afrique centrale de l’autre.

Rayonnement
Aux dires de Ravi Kumar, le Cameroun est «le pays avec lequel le commerce avec l’Inde a le plus crû dans la région Afrique centrale ces dernières années. Le potentiel que recèle cette coopération commerciale demeure immense». Parce qu’ils sont présents dans plusieurs secteurs d’activités (commerce, industrie, médecine), les Indiens voient en cette nouvelle disposition diplomatique une fenêtre aux attributs de leur «puissance» dans la sous-région. «On n’échappe pas à la réalité. Cette ambassade va nous permettre d’utiliser notre savoir-faire au mieux de nos intérêts partout en Afrique centrale», projette Utej Suprakash, un homme d’affaires indien basé à Douala. Il estime qu’une chancellerie indienne au Cameroun implique une accélération des flux de personnes, de biens, d’images et d’idées indiens à travers toute l’Afrique centrale. Dans un registre voisin, Waminath Uresh (commerçante) évoque une intensification des liens, des modes d’interaction, un étirement des pratiques sociales, culturelles, politiques et économiques, «pour rendre possible l’action à distance».

Précédent
Bien normal. D’autant plus que, dans les esprits des uns et des autres, l’ambassade à construire est précédée au Cameroun par la culture indienne. «Il y avait toujours un lien entre les deux. Pour commencer, c’était les films indiens que tout le monde appelle films hindous, et qui étaient très populaires au Cameroun. Le premier ambassadeur de la culture indienne au Cameroun était le film. Les Camerounais aimaient beaucoup nos films. Il y en avait même qui chantaient «piapiapia! Je pense que l’ambassade va davantage promouvoir tout cela», projette Ravi Kumar.

Jean-René Meva’a Amougou

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